Passons à table, puisqu'au fond, c'est là qu'il met toute son âme. Inogashira est sans cesse à la recherche du meilleur boui-boui, de la bonne table où l'on sert des spécialités maison, qu'il déguste avec une curiosité gourmande. Il arrive néanmoins qu'il s'emballe quand il commande, réalisant un peu tard que ses plats se combinent mal ou qu'il a eu les yeux plus grands que le ventre : gourmet, mais pas toujours très lucide... Il est également capable de s'empiffrer de plats de supérette ou de se faire sauter la panse dans un yakiniku de banlieue industrielle, tel un Chôji encravaté. Gourmet, mais pas toujours raffiné non plus.
Le Gourmet solitaire nous plonge dans le quotidien d'un Japon affairé et gourmand, avec un cicerone qui ressemble un peu à monsieur tout le monde, à ceci près qu'il semble avoir un peu plus de temps que les autres, et le loisir d'aller là où son appétit le mène. Sa solitude ne lui pèse pas, mais est-elle pourtant si légère ? On s'attendrait à ce qu'un ventre bien rempli dénoue la langue, donne envie de causer et de partager son plaisir d'avoir bien mangé. D'autant plus qu'il a le temps... Est-ce une impression, ou notre gourmet se défie-t-il un peu du contact humain ? Ne s'inquiète-t-il pas trop du regard des autres, dans ses sempiternels monologues intérieurs, qui sonnent parfois un peu faux, comme lorsqu'on parle tout seul pour meubler le silence. Croit-il à ce point nécessaire de défendre sa solitude ? A-t-il peur d'être envahi ? C'est un étrange portrait que nous livre Taniguchi, car on pourrait penser qu'un tel hédonisme gourmet soit finalement plus partageur.
Si je préfère de loin 歩くひと(L'homme qui marche), plus chaleureux, voilà tout de même un beau panorama de la gastronomie japonaise, qui ouvre l'appétit et donne envie de prendre ses baguettes.いただきます!
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